Article paru le 12 mars dans le journal Libération.
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Deux semaines après la tempête Xynthia, les interrogations demeurent sur la frénésie immobilière des élus de La Faute-sur-Mer, qui ont autorisé la construction de lotissements dans une zone soumise à des risques de «submersion marine» mentionnés par certains permis de construire signés de leur main (voir fac-similé ci-dessous). Etait-il prudent de construire en contrebas d’une digue sur des terrains situés dans une «cuvette», terme employé par le secrétaire d’Etat au Logement, Benoît Apparu ?
Des documents en notre possession font apparaître que l’adjointe en charge de l’urbanisme, Françoise Babin, ou des membres de sa famille, avaient des intérêts personnels directs dans ces opérations. Sont concernés les lotissements des Voiliers et des Doris, où ils possédaient des terrains, et qui figurent parmi les zones les plus meurtries par la tempête. Xynthia a fait 27 morts à La Faute-sur-Mer dans la nuit du 27 au 28 février. Un médecin urgentiste de l’Hôpital de Fontenay-le-Comte (Vendée), propriétaire d’une résidence secondaire, a perdu sa femme, sa mère et deux de ses enfants dans le quartier des Voiliers, contigu à celui des Doris.
Champignons. Près d’une centaine de pavillons ont été édifiés dans ces deux zones depuis une dizaine d’années. Un activisme immobilier pour le moins imprudent, au vu de la topographie des lieux et des risques de submersion. L’autorisation de lotir aux Doris (84 terrains à bâtir) a été signée par le maire, René Marratier, le 1er octobre 1999. Puis, les permis de construire sont allés bon train et les maisons ont poussé comme des champignons sur des terrains où, jadis, broutaient des vaches.
L’histoire de ce lotissement mérite d’être racontée tant charge d’élu et intérêts particuliers semblent entremêlés. Tout commence par une réunion du conseil municipal de La Faute-sur-Mer, le 11 juillet 1996, qui doit délibérer sur l’aménagement urbain dans lequel s’inscrit le projet des Doris. «Mme Babin étant directement concernée par l’objet de la délibération qui va suivre, elle quitte la salle et ne prend part ni à la discussion ni au vote», peut-on lire dans un compte rendu des délibérations du conseil municipal que s’est procuré Libération. Les élus prennent connaissance des documents d’urbanisme. «Chacun estime que ce schéma trouve tout à fait sa place dans ce secteur puisqu’il est urbanisé de part et d’autre.» Le projet est approuvé«par quatorze voix pour, et une abstention». Aucun vote contre. Le lotissement est réalisé par une association foncière urbaine (AFU) dans laquelle Françoise Babin a des parts avec quatre autres associés. Dans les années qui suivront, en tant qu’adjointe au maire chargée de l’urbanisme, elle signera plusieurs permis de construire pour l’édification de maisons dans ce lotissement.
Clés en main. Viennent ensuite les Voiliers, «lotissement réalisé par la SARL Les Voiliers représentée par M. Babin Philippe […] en vue de la réalisation de 35 lots à usage d’habitation», indique l’autorisation, signée 11 décembre 2002 par le maire. Philippe Babin est le fils de l’adjointe. Dans cette opération, il est propriétaire des terrains et parfois promoteur immobilier. Il vend des espaces ou des maisons en Véfa (vente en état futur d’achèvement), autrement dit clés en mains. Là encore, des permis de construire délivrés sur ce lotissement portent la signature de sa mère.Nous avons tenté de joindre l’élue, sans succès. Philippe Babin, en revanche, nous a précisé que «toutes ces constructions ont été réalisées conformément aux règles qui ont été validées lors de la constitution de ces lotissements». Il souligne que les permis de construire étaient instruits par la DDE, qui propose au maire de les accepter ou de les refuser. «On n’a pas tiré avantage de la situation», dit-il.
Sur un permis de construire que s’est procuré Libération, daté de décembre 2007 et signé par Françoise Babin, apparaît la mention suivante : «Le terrain du projet est situé dans une zone d’aléa moyen à fort de submersion marine», conformément «à l’arrêté préfectoral […] du 12 juillet 2007». C’est à partir de cette date, en effet, que les préfets qui vont se succéder en Vendée s’inquiètent de la dangerosité du secteur, et tentent d’imposer aux communes de La Faute-sur-Mer et de L’Aiguillon-sur-Mer un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) prévoyant notamment la création de zones rouges où il serait interdit de construire. Mais les services de l’Etat se heurtent à la résistance des élus, focalisés sur le développement de l’activité touristique et économique de leurs communes, qui avait pour corollaire une activité immobilière débridée (Libération du 8 mars). Pour cette raison le PPRI n’a toujours pas été validé à ce jour. Il reviendra peut-être à la justice de dire s’il y a eu «prise illégale d’intérêt» de l’adjointe au maire pour les opérations immobilières dans lesquelles elle et sa famille étaient concernées.
6 réponses à to “Les permis à risques de La Faute (Libération)”
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pour Jasques Ghemard. L’expresion mise en vente est impropre et montre les carences sémantiques du législateur. Le code des domaines est incontournable et l’expression « mise en vente » ne dit pas « aliénées » elle signifie seulement affectées à un concessionnaire. Les émus n’ont pas le pmouvoir en dehors du congrèq de modifier une loi constitutionnelle. Ce ne sont pas des précedents illégaux qui ont ce pouvoir. C’est tellement vrai que le conseil d’état ne donne que des réponse embarassées et idiotes sur la question…Quand il veut bien répondre. Avez-vous lu le code des domaines et y avez-vous trouvé une possibilité de contourner l’inaliénabilité? C’est par cela qu’il faut commencer
Ja
Monsieur Tatard, de nombreux exemples montrent que le domaine public n’est inaliénable que tant qu’il est public. Les mots sont parfois difficile à interpréter, mais la réalité l’est plus facilement.
Par exemple donc, tous les polders ont été gagné sur le domaine public maritime et ils sont maintenant des propriétés privées.
D’ailleurs la Loi n°63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime dit : « Les parcelles de lais et relais incorporés au domaine public pourront être déclassées lorsqu’elles ne seront plus utiles à la satisfaction des besoins d’intérêt public. Les départements et, à défaut, les communes bénéficieront d’un droit de préférence pour l’acquisition des parcelles ainsi déclassées, si ces parcelles sont mises en vente. »
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068228&dateTexte=20060630
Curieux ce refus de connaitre les lois qui régissent la domanialité publique et qui en interdisent l’aliénation.
Curieux de voir qu’on oppose un acte addminkstratif de déclassement à une loi constitutionnelle.
Curieux de constater que personnenne ne semble comprendre que l’entrée dans le domaine public est irréversible: Il n’est plus possible d’en sortir et c’est un bien commun de tous les Français qui ne peut être utilisé que pour la chose publique et seulement dans l’intérêt du public.
Si lEtat en a l’usufruit, il n’n n’a pas la propriété. Alors ceux qui croient être propriétaire du terrain sur lequel est construite leur maison se trompent souvent, même s’ils l’ont payé….à tort
[…] toutes faites un parfait contre-exemple. La reconstitution des origines exactes de la tragédie, que nous livrons ici en exclusivité, montre que c’est l’autorité administrative étatique, celle du préfet en l’occurrence, qui […]
[…] commune dont le territoire, en-deçà du niveau de la mer, a été presque entièrement immergé. Libération révèle vendredi matin que des autorisations de construction dans des quartiers jugés à fort risque par la préfecture […]