Au centre de la photo, les lotissements des Voiliers et des Doris, les plus cruellement touchés par les inondations du 28 février. : Philippe Chérel

Depuis dix ans, les menaces d’inondations à La Faute-sur-Mer étaient parfaitement connues des services de l’État et des élus. Rapports, études et comptes rendus de réunions le démontrent.
Enquête
Un mois après la tempête, qui a coûté la vie à vingt-neuf personnes à La Faute-sur-Mer (Vendée), une certitude s’impose : les risques étaient connus de tous. Dès le début des années 2000, les zones submersibles sont parfaitement identifiées dans un atlas des zones de submersion réalisé par les services de l’État.
Celle de La Faute-sur-Mer y est considérée comme « la plus dangereuse du département ». Depuis les années 1980, les municipalités successives ont bâti plus de 3 000 maisons derrière la digue en terre. « La rupture de celle-ci engendrerait des dégâts majeurs aux biens et aux personnes », redoutait, en 2008, Stéphane Raison, ancien ingénieur de la DDE en Vendée.
L’inquiétude des écologistes
Ces avertissements n’ont pas ralenti le développement immobilier de la commune. Des permis de construire ont été accordés régulièrement. Notamment pour Les Voiliers, un lotissement de trente-cinq maisons, l’un des plus meurtris par la tempête. Il a été réalisé par la SARL Babin et consorts. Quand le conseil municipal s’est prononcé sur cette opération, Françoise Babin, membre de la famille et première adjointe en charge de l’urbanisme, a d’elle-même quitté la salle. « Tout s’est fait dans la légalité », rappelait René Marratier, le maire de La Faute, quelques jours après la tempête.
En septembre 2002, la commission des sites et des paysages de la Vendée donne ainsi un avis favorable au projet des Voiliers, qui sera suivi par l’État. Dans cette commission, siègent des élus locaux et du conseil général, ainsi que des représentants de l’État. Ce jour-là, comme le montre le procès-verbal, la question des inondations est abordée, mais on ne s’y éternise pas.
Les seuls à réellement s’inquiéter sont deux écologistes. Colette Maillet, à l’époque présidente de l’Association de défense de l’environnement en Vendée (Adeve), émet des doutes « sur la localisation du projet ». Elle s’abstiendra lors du vote.
De son côté, Hugues Destouche, conservateur de la réserve naturelle de Saint-Denis-du-Payré, s’oppose « en raison des risques de sécurité sur ce projet ». Pour rassurer tout le monde, René Marratier, le maire de La Faute, annonce « un programme de rehaussement des digues qui permettra de renforcer le tissu de prévention ».
En mars 2005, toujours à propos du lotissement des Voiliers, le commissaire-enquêteur exprime son avis. Favorable, là aussi. En tête de son argumentaire, « l’absence ou la quasi-absence de terrains à bâtir dans une commune très touristique », ce qui, à ses yeux, légitime le projet. Il relève aussi que ce lotissement, « une fois habité, viendra en relier deux autres et comblera, de ce fait, une dent creuse, inesthétique ». Il ajoute toutefois que l’endroit « est soumis à un niveau de risques d’inondations réels malgré les précautions prises ».
« Il est de notoriété que La Faute est protégée »
En juin 2006, toujours à La Faute, un lotissement voisin, le village des Doris, presque achevé, fait l’objet d’une procédure de régularisation. Autrefois, c’était l’ancien communal, avec ses troupeaux de vaches les pieds dans l’eau. Quand s’ouvre l’enquête publique, les quatre-vingt-cinq lots sont déjà construits à 90 %… Dans ses conclusions, le même commissaire-enquêteur évacue les craintes d’inondation : « Il est de notoriété que La Faute est protégée par une digue étroitement surveillée et entretenue […] qui vient d’être remodelée et surélevée. » Il conclut ainsi son courrier : « Vis-à-vis des inondations, le lotissement est sécurisé. » C’est en vain que l’Association pour la sauvegarde de la nature et de l’environnement du littoral de sud-Vendée (Asnel) tire la sonnette d’alarme. « Il serait temps de reconnaître que la capacité d’accueil de La Faute a atteint son maximum sous peine de compromettre la sécurité des gens et des biens », écrivait alors Jean Kahane, président de l’association.
Pas de plainte
Aujourd’hui, il renvoie tout le monde dos à dos: « Il y a manifestement un partage des fautes. » Nicolas Sarkozy, lors de sa venue en Vendée, le 16 mars, avec d’autres mots, n’exonérait personne, lui non plus. L’enquête dira s’ils ont vu juste.
Depuis le 28 février, le parquet des Sables-d’Olonne rassemble des éléments pour reconstituer le film de la catastrophe et vérifier tous les aspects administratifs du dossier, comme la validité des permis de construire. « C’est une enquête classique de constatation, explique Thierry Dran, le procureur de la République. On ne se pose pas la question des responsabilités. On n’en est pas là. »
Une association de victimes s’est constituée. Mais à ce jour, le procureur n’a été saisi d’aucune plainte. Le conseil muncipal de La Faute, lui, a voté une délibération le 24 mars pour s’adjoindre les services d’Olivier Metzner, un ténor du barreau parisien. « On prend les devants pour défendre La Faute », prévient le maire.
Philippe ECALLE et Renaud GARNIER.
8 réponses à to “Xynthia : ces documents qui pointaient les risques (Ouest France 2 avril)”
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Quel dommage que la question de l’aliénation illégale des domaines publics maritimes et communaux soit passée sous silence. En effet, elle engage la responsabilité de l’Etat et de ses services à honoraires ainsi que celle du service des domaines du Ministére de l’économie et des finances.On pourraut y ajouter les notaires dans la recherche de l’origine des propriétés
je tiens avotre disposition mza correspondance avec l’état et les collectivité locale , ainsi que la prese. Voici mon adresse:
tatardflr@orange;fr
il y a eu des inondations dans le siecle dernier…….qui a donné le permis de construire et qui a demandé le permis sur ces parcelles innondables
voila les coupables et ceux la ne peuvent pas dire qu’ils ne savaient pas
petite précision: le reportage se situe à la moitié de l’émission.
http://www.canalplus.fr/c-humour/pid1787-c-groland.html
Voici un autre reportage, qui met en avant les dérives qui ont pu exister. A vous de juger.
http://www.canalplus.fr/c-humour/pid1787-c-groland.html
Comment résister à un maire qui a obtenu plus de 60 % des voix et tous les sièges au conseil municipal? Messieurs les politiques n’y ont bien du mal! Quant aux plaintes probables, elles seront sans doute déposées dès que l’association des sinistrés sera bien mise en place. Je ne peux pas imaginer que les responsabilités ne seront pas clairement établies.
Réponse à : Lafaute
Construire pour le bien d’un village, j’ai du mal à comprendre.
On construit si nécessité et dans les règles de l’art et du respect des nouveaux propriétaires.
Vous dîtes que les articles démontrent la seule responsabilité de la commune, ce n’est pas ce que j’ai lu, ils évoquent également d’autres entités et moi même j’en évoque d’autres non cités encore, mais le temps viendra et fera son oeuvre ( la justice ).
Vous avez raison lorsque vous évoquez la longueur et complexité des procédures à venir, bon nombre des sinistrés seront décédés, de mort naturelle j’espère, bien avant la fin de l’ensemble des procédures.
Mais encore faudra t’il qu’il y ait dépôt de plainte ( il est encore un peu tôt pour certains et je pense aux familles sinistrées n’ayant pas eu de décès ) quand aux familles endeuillées, là je pense que nous allons pas tarder à voir arriver les plaintes.
Oui il y a volonté de construire et certainement pour le bien du village et de la région. Malheureusement un peu partout, zones inondables ou pas. Urbanisation à outrance. La municipalité n’est pas comme le démontre les articles, la seule responsable dans cette catastrophe ! TOUTES les autorités de tutelles sont mouillées. Ca laisse présager une suite mouvementée et des procédures à rallonge.
Excellent travail du Parisien puis du nouvel Obs.
Ouest France était-il en reste ?
Ne faisons pas la fine bouche, leur papier vient corroborer les dires des autres journaux.
Continuer Messieurs et dames.
L’étau se resserre ( même si tout ceci est à prendre comme une info seulement ), on sent bien la volonté de la ou des communes à construire quasiment à tout prix ( 53 morts, il devait y en avoir aucun ).
J’espère qu’à terme, la justice, au delà des responsabilités des autorités morales saura faire rendre compte aux personnes physiques les responsabilités de ces décès et de tout ce gâchis.