J. D. 01/12/10 à 08h59
A La Faute-sur-Mer, les derniers sinistrés doivent se décider aujourd’hui (mercredi) à vendre ou non leur maison. Un choix sur fond de polémique.
Dix mois après le passage de Xynthia, les habitants de La Faute-sur-Mer et de L’Aiguillon, en Vendée, n’en finissent pas de panser leurs plaies. Dans ces deux communes, où 29 des 47 victimes de la tempête sont décédées, les derniers habitants de la zone de solidarité se décideront aujourd’hui : accepter ou refuser l’offre de rachat de leur maison par l’Etat. A ce jour, la grande majorité des sinistrés a déjà dit oui : seuls 9 refus ont été essuyés sur les 802 propositions envoyées. Restent encore 113 habitants en attente. Sont-ils des indécis ou d’irréductibles résistants, refusant de quitter leur propriété ?
208 propriétaires attendent de signer la vente
L’Association des victimes de La Faute-sur-Mer (Avif), elle, ne cache pas son inquiétude. D’abord parce que, selon elle, les propriétaires qui ont hésité se retrouvent aujourd’hui avec des estimations bien inférieures à celles des sinistrés qui ont dit oui tout de suite. Autre constat, sur 680 propositions acceptées, 208 maisons n’ont pas encore été vendues. « Quand ces propriétaires appellent la préfecture, on leur répond qu’il n’y a pas les fonds pour payer avant 2011 ! », s’indigne Renaud Pinoit, porte-parole de l’Avif (lire notre interview ci-dessous). De quoi alourdir encore le fardeau et l’angoisse de certains sinistrés, abattus par la catastrophe, qui ont dû emprunter pour se reloger.
Face à ces critiques, la préfecture de Vendée rassure : « Nous avons encore reçu un versement de plusieurs millions d’euros la semaine dernière, un autre est attendu cette semaine ! », argue le sous-préfet, Frédéric Rose. Mais pour l’Avif, un autre élément va dans son sens : « Les dernières estimations des maisons sont bien plus faibles que celles datant de l’immédiat après-tempête », assène Renaud Pinoit. Une différence « de l’ordre de 30 % », que la préfecture réfute, là encore : « La procédure est strictement la même depuis le début. »
Quelques irréductibles
Cela n’empêche pas l’amertume, comme celle de ce propriétaire : « Avec la somme qu’on me propose, je ne pourrai jamais me reloger à l’identique ! Les premiers ont été servis, et maintenant je devrais partir loin, et payer plus cher. » D’autres continuent à « résister », les irréductibles : « Je ne cède pas à la pression. Une enquête de “déclaration d’utilité publique” doit être lancée en 2011. J’attends qu’on me dise si je suis expropriable ou pas. Ensuite seulement, je déciderai de vendre ou non ! », s’exclame un propriétaire d’une résidence secondaire à La Faute, bâtie en 1967 par ses parents, au cœur de la zone de solidarité. Cet ingénieur de 50 ans s’inquiète aussi de l’hiver qui arrive, avec son lot de tempêtes. « Il n’y a aucune cohérence, pas de plan de sauvegarde communal, pas de système d’alerte… La Faute sert de cobaye ! Et si Xynthia revient cet hiver, les mêmes causes produiront les mêmes effets… avec moins de morts, puisque tout le monde est parti. » Dix mois après, le sentiment d’injustice n’a pas disparu derrière les digues.
« Une attente insupportable »
Renaud Pinoit, porte-parole de l’Association des victimes de La Faute-sur-Mer (Avif), dénonce les retards pris dans le processus de rachat des maisons.
France-Soir. Que reprochez-vous à l’Etat ?
Renaud Pinoit. Si les premières offres faites aux propriétaires sinistrés étaient très intéressantes, ce n’est plus le cas. Il y eu une volonté de faire un effet d’annonce, pour les inciter à vendre : je connais un couple dont la maison, estimée 200.000 € avant la tempête, a été rachetée 270.000 € par l’Etat ! Aujourd’hui, c’est l’inverse. Pour des maisons identiques, en surface et en situation, on constate un écart de 30 % entre les estimations de l’après-tempête et celles qui sont plus récentes. De 300.000 €, on passe à 200.000 €, comme s’il n’y avait plus d’argent. Est-ce une volonté de freiner les ventes ? Ou a-t-on surévalué les premières maisons ?
F.-S. Ceux qui ont accepté le rachat sont-ils satisfaits ?
R. P. Certains, oui. Mais on voit des gens qui ont dit oui à la proposition de rachat, et pour qui rien n’a avancé depuis plusieurs mois. Certains ont contracté des prêts, racheté un logement. Et quand ils appellent la préfecture de Vendée, on leur répond que la signature chez le notaire ne pourra pas intervenir avant l’année prochaine, parce qu’il faut attendre que le nouveau budget soit établi. Bref, qu’ils devront attendre le mois de mars ou d’avril pour toucher l’argent ! La préfecture dément, mais en attendant, le préfet ne signe pas d’arrêté d’achat de maison.
F.-S. Selon vous, combien de personnes sont concernées par ces difficultés ?
R. P. Sur les 600 propriétaires qui ont accepté de vendre leur maison à l’Etat, environ 300 ne sont pas encore passés chez le notaire. Parmi eux, un grand nombre doit rencontrer ce type de difficultés. D’autres, qui se situaient dans la première zone de solidarité, ont changé d’avis : un nouveau périmètre d’expropriation a été défini, et certaines maisons ne seront pas détruites. Ils vont décider de rester. Et puis il y a quelques irréductibles, souvent des résidents secondaires, qui sont à la marge de la zone, qui refuseront de vendre.
6 réponses à to “Le dernier combat des sinistrés de Xynthia (France Soir)”
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regardez à date butoir pour les réponses des sinistrés la note que j’ai écrite et réagissez en masse
Jacquotte,
Les Domaines ne sont venus que mi-juillet pour nous. Ils n’ont pas pu venir plus tôt, lorsque mon mari s’est rendu à la faute à deux reprises.
Ensuite, l’offre ne nous est jamais parvenue par courrier. Nous avons reçu un mail fin septembre, après plusieurs réclamations de notre part, avec une offre bien inférieure au prix du marché avant tempête (et encore, ma belle-mère n’a jamais reçu de courrier!). Il ne nous était donc pas possible d’accepter plus tôt … Ce n’est pas un choix de notre part.
Mais il est vrai que nous ne sommes pas les plus à plaindre. La perte n’est que matérielle…
Jacquotte, tu as sûrement accès à des informations que je n’ai pas, entre autres sur les choix que l’on doit faire et qu’on ne peut pas tout avoir, le beurre, l’argent du beurre etc…Mon point de vue était plus général.
Je pense avec toi à ce premier Noël de ceux qui ont perdu les êtres qu’ils aimaient et qui leur ont été arrachés …
rien n’empêchait les sinistrés de faire estimer et accepter rapidement les propositions de l’état. Dans le vie il faut faire des choix et on ne peut pas gagner à tous les coups et sur tous les tableaux.
A mon avis les plus à plaindre sont ceux qui n’ont pas eu de choix et doivent conserver coûte que coûte leur maisons ,ils auront effectivement un bilan financier désastreux. Idem pour ceux qui ont pris un crédit relais et n’ont toujours pas signé l’acte notarié.
enfin le pire est pour les familles des disparus qui eux ont une double peine.Je pense souvent à elles à l’approche de Noêl. Ils vont leurs manquer terriblement.
Mon message se voulait un commentaire de l’article « la si longue attente.. ».
Cet article de France Soir donne le bon point de vue, celui des souffrances et des traumatismes laissés par Xynthia, puis par sa gestion …Les noms des sinistrés donnés au fil de cet article donnent encore plus de vérité et d’intensité aux douleurs de ces familles. Sans mettre en cause les hommes, faire de ces communes l’exemple type d’une gestion de l’après-coup d’une catastrophe du genre Xynthia, a laissé une impression durable dans la population que l’expérimentation l’emporte sur la compassion, et la gestion sur l’humain. Une fois encore …Dur…Dur..