La catastrophe, qui a fait 47 morts en février 2010, a été l’objet d’une couverture médiatique exceptionnelle. Un an après, plusieurs émissions sont en préparation

Il y a presque un an, la tempête Xynthia faisait la une des médias après avoir balayé une partie du pays, dans la nuit du 27 au 28 février.

Le bilan de 47 morts, dont 29 en Vendée et 12 en Charente-Maritime, les images des victimes hagardes et celles des quelque 6 000 maisons et 50 000 hectares de terres agricoles inondés par la mer défilaient en boucle sur les écrans.

Correspondante pour France 3, la journaliste Sandrine Gadet n’a pas oublié. « La nuit de la tempête, un mytiliculteur de l’Aiguillon-sur-Mer m’a contactée. Il était affolé. Le caméraman et moi avons foncé sur place. C’était l’apocalypse », raconte-t-elle.

Une impression partagée par Grégory Phillips, grand reporter sur France Info. « Le Zodiac des pompiers était le seul moyen pour circuler. Quand j’en ai vu certains en pleurs, j’ai compris à quel point la situation était grave. La direction nous a envoyé deux présentateurs et deux reporters en renfort, avec une voiture satellite. »

« Les spectateurs se sont identifiés aux victimes »

Télévisions, radios et presse écrite ont été nombreux à faire ce choix.

Chargée de communication au service départemental d’incendie et de secours, et mise à disposition du préfet en tant que référent presse, Isabelle Forestier a été en première ligne face à cette affluence. « À L’Aiguillon-sur-Mer, 140 à 160 journalistes étaient présents chaque jour. BFM a envoyé successivement 21 personnes, iTélé 12, TF1 11, France Info et France Inter 10. Nous avons aussi reçu la BBC, la Télévision suisse romande, deux télés et une radio belges, une chaîne espagnole et un journal néerlandais. »

Aujourd’hui encore, cette ancienne rédactrice se dit surprise. « Il faut remonter au drame de Vaison-la-Romaine pour retrouver une telle médiatisation. L’actualité, creuse à l’époque, et la concentration géographique de 29 morts en Vendée ont sûrement joué. »

Une opinion partagée par Antoine Estève, envoyé spécial pour iTélé. « La Vendée et la Charente-Maritime sont des lieux de vacances qui parlent à tout le monde. Les spectateurs se sont identifiés aux victimes. Les chaînes l’ont vite compris », confie ce journaliste, qui a enchaîné les directs toutes les demi-heures, les trois premiers jours.

« Dans les catastrophes, il y a toujours une pression forte »

Cette affluence a marqué le coup d’envoi d’une course aux images et aux témoignages, qui a duré plus d’une semaine. « Dans ce genre de catastrophes, il y a toujours une pression forte. On n’a pas le temps de réfléchir », confie Philippe Castel, grand reporter sur France 3.

« Il fallait absolument des images, car on avait un direct dans le journal de 20 heures, se souvient Karine Comazzi, envoyée spéciale pour France 2. Les sauveteurs étaient dans l’urgence de sauver des vies et nous dans celle de trouver des témoignages. Dans ce cas, il faut se respecter et s’entendre. »

En Charente-Maritime, où le nombre de journalistes était moindre, sa consœur Anne Guille-Epée s’est frottée comme elle à de nombreux obstacles techniques. « On a travaillé toute la nuit. Mais lorsqu’on a voulu envoyer notre sujet à Paris, il n’y avait plus d’électricité. On a témoigné par téléphone. »

Parler avec les médias : une « thérapie »

Les dérives, rares, n’ont pu être totalement évitées. « Certains ont eu un comportement indigne d’une carte de presse. Mais la sanction était immédiate : le lendemain, les gens ne leur parlaient plus », observe Karine Comazzi.

« Pour éviter les images morbides, on a permis à certains journalistes d’embarquer avec les pompiers, dans des secteurs où on savait qu’il n’y aurait pas de corps flottants. Mais une équipe a quand même fait un direct devant le funérarium. De façon générale, il y a eu beaucoup plus de pudeur chez les médias locaux, qui étaient amenés à revenir », complète Isabelle Forestier.

Malgré tout, à La Faute-sur-Mer et à l’Aiguillon-sur-Mer, la pression médiatique n’a pas été mal vécue par les habitants, dans les premiers jours. « Lors des grands drames, les gens sont tellement sous le choc qu’ils ont besoin de parler. Il est très facile de les interviewer », constate Patrice Gabard, correspondant pour RTL à Nantes.

Chantal Berlemont, sinistrée, approuve. « Parler avec des personnes neutres a été une vraie thérapie. Je me suis sentie moins seule », confie cette mère de famille, qui a répondu à des dizaines d’interviews.

Une impression partagée par Damien Ollivier, agriculteur sur le canton de Chaillé-les-Marais, en Vendée. Au lendemain de la tempête, il a reçu 124 appels téléphoniques de médias, désireux de se rendre dans les zones inondées. « Les jours suivants, les journalistes étaient partout. Nous étions débordés. Certains recherchaient le sensationnel. D’autres s’intéressaient vraiment à notre territoire. »

La tension est grimpée d’un cran…

Certains riverains, lassés des questions, ont pris leurs distances. Les associations de sinistrés fraîchement créées, elles, multipliaient interviews et conférences de presse. « Les gens ont compris qu’ils ne réussiraient à obtenir des digues qu’en communiquant », estime Anne Guille-Epée.

Un choix payant, selon certains. « La présence des journalistes a eu un effet amplificateur. Les politiques agissent en fonction de la pression médiatique. C’est elle qui a permis d’accélérer les indemnisations des agriculteurs », estime Damien Ollivier.

A contrario, d’autres habitants ont accusé les médias d’être à l’origine d’un tourisme voyeur. La tension est grimpée d’un cran lorsque, très vite, la plupart ont commencé à rechercher d’éventuelles responsabilités politiques. « Fallait-il construire sur les zones touchées ? Le drame aurait-il pu être évité et comment ? Quand vous posez ces questions, des portes se ferment forcément », explique Patrice Gabard.

« Beaucoup ont envie de tourner la page »

Aujourd’hui encore les médias, et en particulier les quotidiens régionaux, évoquent régulièrement les conséquences du drame. « Il y a eu l’annonce des zones noires, la mobilisation contre ces zones, les visites de ministres, etc. La prochaine étape sera la destruction des habitations jugées dangereuses par l’État », constate Marie-Claude Aristegui, journaliste à Sud-Ouest.

Cette couverture s’explique également par des raisons plus profondes. « Les gens sont morts dans leur maison, le lieu où l’on se sent le plus en sécurité d’ordinaire. Cela nous interroge tous sur la fragilité de l’homme et son impuissance face aux éléments », résume Sandrine Gadet.

À La Faute-sur-Mer et à l’Aiguillon- sur-Mer, certains redoutent une nouvelle affluence, à l’occasion de la date anniversaire de la tempête. « Beaucoup ont envie de tourner la page », observe Éric Gallois, correspondant pour un quotidien local, et lui-même sinistré.

« On aimerait qu’on parle de nos communes de façon plus positive », approuve Michel Essirard, président de l’Apam, l’Association des plaisanciers. « Malheureusement, dans ce genre de catastrophes, certains regrettent le départ des caméras et des micros, qui les aidaient à défendre leurs droits, souligne Karine Comazzi. Car les médias nationaux sont déjà passés à autre chose. »

Elisabeth PETIT

11 réponses à to “La tempête Xynthia sous l’œil des médias (La Croix)”

  • Brigitte Devilez says:

    Eric,
    Le maire a été démocratiquement élu. Mais la démocratie ne consiste à placer un bulletin de vote tous les cinq ou six ans dans une urne pour se désintéresser ensuite de ce qui se passe.

    Le maire est le garant de la sécurité et du respect des lois dans une commune. Il n’est pas besoin de souffrir d’un syndrome obsessionnel pour en revenir à lui après un drame comme celui là !

  • escabourg says:

    Les beaux jours et les vacances vont amener un peu de touristes et les habitants semi secondaires et secondaires, ça va permette de se changer un peu les idées mais pas question de baisser les bras.

    On dit beaucoup de visites sur ce site , cela ne fait qu’un tiers des vacanciers de l’été…où sont les autres? vous qui aimez venir à la Faute faites le savoir !!

  • musette says:

    Moi non plus Eric, je ne la laisserai pas supplanter la démocratie, mais pour l’instant, on n’a que cela pour sortir La Faute du cercle vicieux et secret dans lequel elle a été enfermée depuis de nombreuses années. C’est la vertu des médias aujourd’huid’ouvrir ce cercle. A nous de jouer en ouvrant en grand et en mettant au jour cette sale petite organisation. Quand, nous aurons fini avec cela nous verrons ce qui restera. Nous savons tous que les médias se retireront. Mais en attendant qu’ils éclairent la place et tendent des micros. Le forum est vivant, il grouille de monde.

  • Eric Gallois says:

    Brigitte, en lisant simultanément nos deux commentaires, le tien et le mien, j’ai l’impression que nous ne parlons pas du même sujet. Mon propos concerne les habitants de La Faute, face aux médias et à leurs excès. Or, après ta première phrase de bon aloi, je vois une sorte de syndrome obsessionnel reprendre le dessus. Quel que soit le thème d’une discussion, quel qu’en soit le point de départ, on en revient, plus ou moins rapidement, mais systématiquement, toujours au même point : la municipalité et le maire. Le débat est irrésistiblement attiré, happé par ce pôle, et n’en sort plus (petit aparté entre matheux : ça fait comme 495, le puits de Kapekar).

    Non, le regard extérieur des médias ne me gêne pas, pourvu qu’il s’effectue à l’oeil nu et non au travers de certains instruments optiques déformants, comme cela peut arriver. Les médias sont un outil, un outil d’information. Et comme chaque outil, on peut en faire plus ou moins bon usage. On peut même essayer de l’utiliser pour autre chose que sa destination première. Et même parfois, ça peut marcher, mais pas sans risques.

    Pour ce qui me concerne, je ne suis pas disposé à laisser la « médiacratie » supplanter la démocratie.

  • Musette says:

    Techniquement, nous n’avons pas d’autre choix que de faire « grand vaudou », que de faire ce grand exorcisme, pour que nos morts ne reviennent pas hanter les générations à venir. Ce ne sont pas les médias qui sont en cause. Ils aident à faire ce cérémonial. Ce sont ceux qui ont permis cette descente aux enfers. Brigitte a raison, on ne peut pas continuer à vivre comme si de rien n »était.
    Les « vrais  » fautais n’ont pas voulu voir les dérives dans lesquelles cette municipalité les entraînait, c’est maintenant qu’ils doivent regarder en face ce qu’ils ont permis! Eux et eux seuls!..D’ailleurs, on voit apparaitre carrément des mouvements haineux qui ne se gênent pas pour s’exposer ! Car, voir en face la saloperie dont on a été complice, c’est dur !
    Ça commence à bien faire aussi cette revendication d’un bonheur béat qui cache mal une absence totale de civisme ! Excuse moi Eric, mais l’heure n’est pas à dormir tranquille sur ses deux oreilles.

  • Brigitte Devilez says:

    Oui Eric, beaucoup ont envie de tourner la page. Il faut revivre après cette terrible catastrophe et retrouver la sérénité dans ce petit village que nous aimons tous.

    Mais pour reconstruire un avenir serein, il faut commencer par comprendre les erreurs passées pour que cela ne se reproduise jamais. Le déni ou le mensonge ne permettront pas de le faire. C’est pourtant ce que nous propose aujourd’hui la municipalité !

    Le regard extérieur des médias gêne ? On a honte de montrer que rien n’ a été fait comme il faut dans notre village ? Qu’il est dirigé par un incapable prétentieux ? Oui, c’est difficile d’être jugé, de voir la vérité en face. Mais cette prise de conscience est indispensable pour repartir sur des bases saines.

    Tu nous propose de continuer à aller droit dans le mur en fermant les yeux et en espérant que tout ira bien….. jusqu’à la prochaine fois (que nous ne verrons peut-être pas, ni toi ni moi). Je pense que ce n’est pas non plus cela, aimer sa commune…

  • Eric Gallois says:

    A plaintecontreX

    Non, ceux qui ont envie de tourner la page ne sont pas que « ceux qui ont fait du fric et qui veulent en refaire ». Evidemment, il doit bien y en avoir quelques uns dans le tas, mais il y a surtout des centaines de Fautais qui aspirent à essayer de reprendre une vie -un peu plus- normale, même si pour beaucoup, rien ne sera plus jamais comme avant (ce n’est pas à moi qu’on l’apprendra, tout de même).

    Personnellement, je ne suis ni commerçant, ni artisan, ni entrepreneur d’aucune sorte, et je n’ai rien à gagner de l’afflux des touristes. Il peut y en avoir moins, ça ne m’empêchera pas de dormir. Et des centaines de résidants sont comme moi, n’ont pas plus d’intérêt économique que moi dans la commune. Leur seul intérêt est de vivre en paix, sans être regardés comme des spécimens d’une espèce étrange qui vit dans une réserve. Car là est bien l’effet pervers de l’excès de médias que nous avons vécu, et que nous risquons de revivre dans les jours prochains. Certes, je ne nie pas le droit à l’information (je suis mal placé pour le faire, et ce serait un comble !) mais je m’élève contre les excès, en quantité et dans la durée. Ils contrarient les efforts de beaucoup qui essayent de retrouver un semblant de sérénité, car en ressassant les événements, ils les renvoient au point de départ. Et ils nuisent aussi à La Faute, en entretenant cette image de ville sinistrée. Oui, elle l’a été, sinistrée, mais elle n’est pas condamnée à le rester à perpétuité. Ceux qui aiment vraiment La Faute devraient réaliser cela. Je rappelle qu’aimer vraiment quelqu’un ou quelque chose, c’est l’aimer pour lui ou elle, et non pas pour SOI-MÊME.

    Voilà l’état d’esprit de ceux qui veulent tourner la page, sans but lucratif.

  • Musette says:

    « Etat du serveur » et non « lenteur du serveur »..

  • Musette says:

    Amis bloggueurs, n’oublions pas l’anniversaire de notre administrateur !..
    Voir le chapitre « Lenteur du serveur »…
    Il y a manifestement une tentative pour atténuer l’effet produit par l’émission M6 et  » protéger  » l’élu que nous sommes dans ses différentes collectivités..(sic)… des menaces supposées pesant sur lui à la veille des commorations … officielles.

  • plaintecontreX says:

    « beaucoup ont envie de tourner la page » selon Eric Gallois ?
    Ce sont ceux qui ont fait du FRIC et qui veulent en refaire

  • Tout cela est bien écrit, mais quelle mauvaise communication de la part de l’Etat, parler de  » Zone  » comme si la faute était du côté des habitants de ces lieux ! ! !
    Alors que la chaine de l’Etat est toute responsable des morts ! ! !
    …elle a laissé faire, et sans l’AVIF ce serait une catastrophe ! ! !
    Car c’est pas la mère Tarrery qui a payée de sa poche, mais bien les donateurs ! ! !

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Zone interdite (mkv)

Des catastrophes pas si naturelle que ça (flv)

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