Si vous deviez garder une image de la Vendée, ce serait laquelle ?
Une image liée à Xynthia. Ça ne peut pas être autrement. C’est un drame qui marque une existence. Il a été psychologiquement éprouvant et professionnellement prenant. Depuis le 28 février 2010, il ne se passe pas une journée sans que nous ne consacrions du temps à cette tempête et à ses développements. Et c’est très loin d’être terminé.
Avec le recul, est-ce que vous referiez la même chose ?
Pendant la période de préalerte, oui. Je ne vois pas ce que je pouvais faire de plus compte tenu des éléments que j’avais en ma possession à ce moment-là. Si on devait envisager des changements, c’est en terme de pédagogie dans la communication, concernant l’après-secours. On a agi dans un temps extrêmement précipité. Je pense que les grandes réunions publiques, comme nous l’avons fait pour annoncer les zones noires, ça n’a pas été une réussite.
Est-ce que vous avez été soutenu pendant cette période par le gouvernement ?
Oui. Ce soutien n’exclut pas un sentiment de solitude. Mais je le répète, le soutien, de la part du gouvernement, ne m’a jamais fait défaut. Il m’a aidé pour que je puisse tenir un langage de fermeté et de vérité aux habitants. Je peux comprendre qu’il subsiste chez certains des sentiments de frustration, d’incompréhension, voire même d’injustice. Mais je peux leur assurer que nous n’avons agi que pour créer les meilleures conditions de sécurité.
Est-ce que vous diriez que les populations sont aujourd’hui à l’abri ?
Non. Plusieurs Plans de prévention des risques d’inondation (PPRI) sont en cours mais il manque des plans de communaux de sauvegarde (PCS). On a fait des progrès considérables, mais c’est encore insuffisant.
Est-ce que la « jurisprudence » Xynthia a fait son effet dans l’esprit des élus, ceux de la côte en particulier ?
Il y a une prise de conscience objective et déterminée des élus. Mais je suis parfois frappé par la capacité d’oubli de certains, voire de déni. Il faut des piqûres de rappel. Ça s’appréciera dans la durée.
L’enquête est toujours en cours. Il y aura un procès ?
Oui, je pense. La justice ira au bout du processus, avec des conclusions qui seront proportionnées au drame vécu. De nombreuses personnes seront appelées à la barre, car cette affaire touche à beaucoup d’intérêts. Je suis impliqué en qualité de témoin et je serai amené à prendre la parole le moment venu. Je considère cette échéance avec beaucoup de sérénité.
Est-ce qu’on exerce son métier de préfet de la même manière après avoir vécu Xynthia ?
Non. Il y a eu 29 morts, plus de 750 personnes sauvées, des responsabilités multiples. Je n’avais jamais connu pareil événement, avec une telle intensité. La sécurité civile est devenue une obsession. A mon arrivée dans le Finistère, j’ai d’ailleurs l’intention d’organiser des exercices pour vérifier si tout est opérationnel sur le plan de l’alerte et des secours.
Vous pensez avoir restauré l’image de l’État ?
On a cultivé l’impartialité républicaine et l’application du droit, dans le respect des personnes. J’ai appliqué la politique gouvernementale avec une marge d’appréciation que je revendique. Le gouvernement apprécie qu’on dise la vérité. La loyauté ne veut pas dire déférence ou servilité. On peut faire de grandes choses dans la franchise et en étant soi-même.
Au cours de votre passage, la Vendée a connu un autre événement, politique celui-là, avec la « démission » de Philippe de Villiers de la présidence du conseil général. Vous avez été surpris ?
Oui. C’est la première fois dans ma carrière, et sans doute la dernière, qu’un président du conseil général me remet sa démission. Qui plus est un homme politique de la dimension de Philippe de Villiers. Ça n’est pas banal, venant de quelqu’un qui a été candidat deux fois à la présidentielle. Lui et Bruno Retailleau, avec leurs différences, ont essayé de faire naître une culture du risque après Xynthia.
Est-ce que la Vendée, avec ce changement à la tête du Département, a changé d’époque ?
C’est plus l’époque qui a changé. Cela dit, qui dit changement d’homme dit changement de style. Les deux hommes ne sont pas de la même génération, ils sont très différents, et ils ont une intelligence hors pair.
Quel conseil vous donneriez à votre successeur ?
(Silence). Je me demande si la règle qui s’impose n’est pas de s’abstenir de donner des conseils. Surtout quand on a vécu un événement aussi tragique que Xynthia.
6 réponses à to “Extrait du journal de Ouest France du 29/11/11”
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@ Musette,
Merci de ces précisions un peu moins alarmistes… Si un de nos lecteurs pouvait confirmer …
@ Lapotre,
Les pouces rouges ne méditent pas, ils ont un tic qui se répercute sur leur souris.
Quant à la réflexion du Préfet : « je pense que la justice ira jusqu’au bout », elle n’est peut-être pas due à un doute mais à une mise en garde pour ceux (et il y en a plus qu’on ne le croit) qui sont persuadés que le silence observé par la justice depuis plus de 6 mois est un renoncement…
29 décès ! Même sans dépôt de plainte, il y aurait enquête et procès !!! Et jusqu’au bout…
Je suggère au propriétaire du pouce rouge de bien vouloir méditer sur la déclaration faisant titre de l’article :
» Je pense que la justice ira jusqu’au bout »
Il est pour le moins étonnant de ressentir au travers de la déclaration d’un haut représentant de l’ordre une once de doute sur la menée à son terme de la procédure…
Est-il un instant envisageable que la justice n’aille pas jusqu’au bout ???
L’expression n’est pas « flatteuse » pour la justice du peuple.
Je vais essayer d’envoyer ma réponse à Brigitte qui m’interrogeait sur Metzer dans la rubrique en dessous. Impossible de l’éditer !
Voilà ce que je voulais lui répondre, en espérant que ça passe !
@Brigitte:
Je peux me tromper car il y a plusieurs juridictions qui ont leurs propres règles de fonctionnement.
En appel, c’est un avoué choisi par l’avocat qui reprend le dossier, vérifie sur quelles bases légales l’appel est demandé et plaide.
En cassation, c’est un avocat de la cour de Cassation qui accepte le dossier et plaide.
Pour avoir fait appel à quelques reprises à des avocats, je n’ai jamais signé de contrat. Car, « le contrat » entre l’avocat et le client est un contrat libéral. Il peut être dénoncé à tout moment par les deux parties. En cas de changement d’avocat, le client doit régler ce que l’avocat a effectué. Point. Il me semble que c’est la philosophie.
Si je me trompe, merci de nous éclairer !…
L’interview du préfet met en exergue 3 points intéressants :
1 Il reconnait publiquement que l’annonce de la détermination des zones noires « n’a pas été une réussite » : nous avons ,nous la population de la Faute sur Mer ,clamer notre désaccord tant sur le fond que la forme ,dés le 1er jour , le 8 avril 2010 sans pour cela être entendu !!!
Donc oui, Monsieur le Préfet ,pour cette affaire ,il subsiste des sentiments de frustation ,d’incompréhension et même d’injustice à l’égard de grands décideurs de la République .
Il était temps enfin de reconnaître cet état de fait : vecteur communication totalement dégradé avec tous les impacts humains conséquents à ce type d’évènement:
– 3 versions différentes de zones noires en 8 mois à La faute sur Mer démontrent bien que la 1ère, celle du 8 avril , ne pouvait qu’être précipitée et impactante pour la population, mise anormalement sous pression
– vocabulaire « zone noire » ,surtout à bannir , maintenant il s’agit de « zone de solidarité » : on « aide les propriétaires à partir en les dédommageant » , avec une pression marquée ,sans s’inquiéter de savoir s’ils veulent rester et ,du point de vue sécurité ,s’ils pouvaient rester!
Est-ce bien cela l’impartialité républicaine ?
Il faudra du temps ,voire beaucoup de temps ,pour ceux qui ont vécu l’évènement ,pour ,non pas oublier mais tenter de ne plus y penser…
2 Notre préfet impliqué comme Témoin mais pourtant Acteur pour avoir déclenché,à la source , les alertes et les secours …
3 Je cite : « le gouvernement apprécie qu’on dise la vérité »
question : de quelle vérité parle-ton ?
Est-ce que la population de la Faute sur Mer n’a pas dit la Vérité ?
Cette vérité a-t-elle été appréciée pour ne pas être entendue par le gouvernement via ses représentant ? ?
La conclusion reste modeste et c’est appréciable .
Il est gonflé ! Comment ne voit-il pas qu’il provoque chez ses interlocuteurs des réactions de rejet du fait de son attitude et de son auto suffisance ? Il a si peu le sens de ses fonctions qu’il ne voit pas que ses bras de fer avec les institutions l’ont grillé ? Le procès promet avec des remarques comme celles-là !
S’il en est qui regretteront le départ de M Brot de Vendée, ce n’est pas le cas de notre Maire.
Sur le journal de TV Vendée de vendredi, il déclare « il aurait pu tisser des liens plus étroits avec le Maire que je suis… ». Surprenant non ?
On verra si le nouveau Préfet sera prêt à faire « copain-copain » avec sa Seigneurie ….
Au fait, qui sont les vilains maires qui ont une capacité d’oubli, voire de déni ?