Archive pour le 24 septembre 2014

Audrey Vairé

Pendant la tempête Xynthia, les frères Dubois ont perdu leurs parents. Ils ont découvert les corps, ensemble. Une épreuve terrible, qui a été très difficile à raconter.

Ce mercredi, au tribunal, les témoignages des dernières parties civiles se sont succédé à la barre. Le témoignage de Daniel Dubois, en début d’après-midi, a été particulièrement émouvant.

Cet homme de 53 ans était très proche de ses parents, avec qui il travaillait. La nuit de la tempête Xynthia, il n’était pas à La Faute-sur-Mer et n’a pas vu les nouvelles au matin.

Après un coup de fil inquiétant, il décide de se rendre sur place. « En arrivant à L’Aiguillon, j’ai aperçu les hélicoptères. Tout de suite, j’ai été très inquiet », explique-t-il, ému.

Il rejoint son frère : « je n’arrive pas à trouver les parents », lui dit ce dernier. Les deux frères prennent une barque et s’en vont vers la résidence de leur parents. « Là-bas, j’ai tout cassé pour pouvoir passer », explique-t-il avant de craquer.

« Je criais ma douleur »

« Ils sont morts comme des rats », s’effondre-t-il. Dans la salle, l’émotion est là. Certaines personnes sortent même du tribunal. Il raconte ensuite comment il les a trouvés, enlacés dans la cuisines, nus. « On les a déposés sur le lit, qui flottait. » Daniel Dubois se demande s’ils ont essayé de s’échapper, ce qu’ils ont vécu… « Je criais ma douleur. » 

Puis, tout s’enchaîne. Il faut reconnaître les corps, annoncer la nouvelle au reste de la famille, reprendre le travail… « Au bout de trois semaines, j’ai craqué, j’en pouvais plus psychologiquement et physiquement. J’ai demandé mon premier arrêt de travail en 30 ans. »

Les obsèques de ses parents ont eu lieu à Luçon. 1000 personnes étaient présentes, ils ont ensuite reçu 500 cartes, dont des mots de Philippe de Villiers, du maire de Luçon, de Nicolas Sarkozy… Mais rien de la part de la mairie de La Faute-sur-Mer…

« Je n’en pouvais plus, j’allais lâcher. Ma fille m’a dit ‘Papa je t’aime, je vais t’aider ». Ophélie et Alain ont raconté, à la barre, cette nuit d’horreur le 27 février 2010

Procès Xynthia : comment un père et une fille se sont mutuellement sauvé la vie
Jeudi, les victimes de Xynthia retourneront sur les lieux du drame à La Faute. Certains n’y sont pas retournés depuis le 24 février 2010.© PHOTO

AFP XAVIER LEOTY

 

« Papa je t’aime, je vais t’aider » : le tribunal correctionnel des Sables-d’Olonne se déplace jeudi à La Faute-sur-Mer, où sont mortes 29 personnes lors de latempête Xynthia, après une semaine de témoignages très émouvants, dont celui d’un père et de sa fille qui se sont sauvés mutuellement la vie.

« Je voulais qu’ils  sorte avant moi, je ne voulais pas le laisser« , murmure Ophélie, 17 ans à l’époque. Ophélie Marcos et son père Alain arrivent le samedi 27 février 2010 à La Faute-sur-Mer pour faire une surprise à leur marraine le lendemain, pour son anniversaire.

Mais à 3 heures, ils se réveillent dans une maison envahie par les eaux, prisonniers. A l’intérieur, la lune éclaire par intermittence les meubles qui flottent comme autant de dangers potentiels sur une eau glacée. Après de nombreuses péripéties, Ophélie va réussir à sortir par une fenêtre tandis que son père est arrêté net par un morceau de cloison qui s’effondre.

Il se dégage mais perd ses repères et tâtonne en vain les parois à la recherche d’une issue. Au bout de trente minutes, il ne lui reste que de quoi passer la bouche au niveau du plafond pour avaler un peu d’air. L’eau glacée lui immobilise peu à peu les membres.

Dehors, Ophélie s’est accrochée à la gouttière. Elle croit son père mort. Ses membres s’engourdissent peu à peu. « Je me disais que j’allais rester accrochée en attendant mon tour », arrive-t-elle à prononcer péniblement à la barre, laissant couler les larmes.

« Je n’en pouvais plus, j’allais lâcher »

Son père prend une dernière fois son souffle, et, à bout de force, trouve enfin la fenêtre. Il rejoint sa fille, épuisée comme lui. Ils échangent des regards désespérés, explique-t-il, la gorge nouée.

Alain Marcos n’arrive toujours pas aujourd’hui à expliquer comment, à ce moment-là, il a trouvé la force d’attraper Ophélie et de la jeter sur le toit. Lui est resté accroché à la gouttière. « Il m’a regardée, il m’a dit ‘Laisse-moi, lâche-moi la main, je n’ai plus la force de monter‘ », sanglote-t-elle.

« Je n’en pouvais plus, j’allais lâcher« , explique Alain. « Ma fille m’a dit ‘Papa je t’aime, je vais t’aider’ et elle m’a tiré, elle m’a hissé sur le toit ».

« Je chantonnais pour ne pas qu’il entende les gens qui crient »

L’eau atteint les premières tuiles du toit. « On avait très froid, il y avait un vent énorme… « , décrit Ophélie. Ils vont enlever quelques tuiles et se réfugier sous les combles, s’enroulant dans la laine de verre pour se réchauffer.

Alain Marcos, en hypothermie, menace de s’endormir. Ophélie lui donne des coups pour le réveiller. Dehors, « il y avait des cris, je chantonnais pour ne pas qu’il entende les gens qui crient« , décrit-elle, effondrée, à la barre. « Elle a chanté des chansons, elle m’a tenu éveillé toute la nuit, elle a été remarquable, elle m’a sauvé la vie », remercie Alain alors que dans la salle tout le monde retient son souffle, captivé par l’émotion de leur récit.

Évacués le matin par les secours, hébétés, il va leur falloir dix minutes pour retrouver enfin la mémoire, se souvenir de leurs noms. « On avait l’impression d’avoir fait la guerre« , explique Ophélie. Autour d’eux tout n’est que souffrance et désespoir. « On essaye de trouver un visage qu’on connaît, un sourire », dit Ophélie. En vain. Ils finiront de surcroît par apprendre que leur marraine n’a pas survécu à cette nuit d’horreur. Aujourd’hui des cauchemars les hantent encore. Des réveils en pleine nuit avec « l’impression de se noyer, qu’on étouffe ».

Les parties civiles vont terminer cette semaine d’intense émotion jeudi parl’audience organisée sur les lieux du drame. Le tribunal va cheminer dans ce qui était auparavant des rues traversant des lotissements, aujourd’hui devenus des friches, le long de la digue submergée cette nuit-là, avec des panneaux indiquant les hauteurs d’eau, la hauteur des maisons mais aussi les lieux où ont été retrouvés les morts.

Le procès de l’ancien maire et de quatre autres prévenus va durer jusqu’au 17 octobre. Jugement attendu le 12 décembre.

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Zone interdite (mkv)

Des catastrophes pas si naturelle que ça (flv)

Documentaire de l'agence CAPA diffusé sur FR3 (wmv)

Débat avec PPDA sur FR3 (wmv)

Audition du préfet au sénat (flv)

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