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Audition de Monsieur Jean BIRAULT partie civile

Cette nuit-là ma femme a été très réactive car elle a un sommeil très léger, contrairement à moi, c’est pourquoi lorsque je me suis réveillé, je n’ai pas immédiatement réagi. je n’ai pas pris mes lunettes, je ne me suis pas préparé. Je suis descendu et j’ai ouvert la porte alors que je n’aurais pas dû… Toujours « dans le potage », je suis sorti dans le garage qui était attenant à la cuisine et j’ai débloqué le portail automatique et là l’eau s’est engouffrée. Je n’ai pas pu refermer le portail, il est resté bloquer. La porte vitrée a explosé, il y avait déjà 1m20 d’eau dans la maison.
On a décidé de quitter la maison, nous étions en pyjama. On s’est d’abord réfugié dans le garage, on a voulu ressortir par le toit en enlevant les tuiles mais ce n’était pas possible. L’eau est montée à plus de 1m50 dans la maison. Grâce aux volets, les fenêtres n’ont pas explosé et l’eau ne s’est pas engouffrée partout dans la maison.
On est sorti et on a attendu les secours, on entendait les plaintes des voisins.

Mes parents vivaient à environ 600 mètres de chez moi, je n’ai pas pris le risque de plonger pour les rejoindre car il y avait trop d’eau, c’était trop incertain.
On était sur le toit, on était frigorifié, je ne cessais de penser à mes parents qui étaient âgés. Quand on a été secouru, j’ai immédiatement demandé à ce qu’on aille aider mes parents. Ils ont été retrouvés prostrés. Ma mère qui avait un début d’Alzheimer tenait des propos incohérents tandis que mon père ne disait rien, il était prostré.

Mes parents étaient dépendants, il a donc fallu les placer dans un établissement spécialisé près de chez mon frère à Bordeaux. Ils sont venus s’installer définitivement à La Faute sur Mer en 1996, après avoir pris leur retraite. Lorsque la dépendance s’est manifestée, il était hors de question de les placer en maison de retraite ou en établissement spécialisé. On a mis en place des aides à domicile et nous venions les voir souvent.
Depuis la catastrophe, nous avons été obligés de les placer. Au départ ça allait mais progressivement, ils sont tombés dans la morosité. Ils n’avaient plus goût à la vie. Maman a développé des troubles neurologiques, elle ne pouvait plus utiliser ses mains. Mon père a été très malade et le 20 août 2011 il est décédé. Ma mère ne parlait plus, un jour elle est tombée et s’est cassée le col du fémur. Elle a été immobilisée très longtemps. Elle est décédée quelques temps plus tard…

Sur les conséquences de Xynthia: ce déracinement a précipité leur fin, ils n’avaient plus le goût à la vie. Je me fais le témoin de mes parents car ils ne sont plus là pour en témoigner.

Le Président: l’eau a attend 1m50 alors que vous aviez rehaussé le niveau de votre maison? Pourquoi l’avoir rehaussé?

On avait la conscience de la remonter des nappes phréatiques, en revanche, on avait pas conscience de ce risque d’inondation. On avait surélevé la maison de 50 cm avec des parpaings.
Le risque de la digue n’était pas un sentiment dont on avait conscience.

Le Président: après 2007, lorsque vous avez appris qu’une partie de la Faute sur Mer était sur une zone comportant des risques, avez-vous considéré avoir fait une erreur en achetant votre maison?

Oui, mais on avait pas véritablement conscience des risques.

Le Président: Vous avez eu des informations sur un risque quelconque de submersion par la Mairie?

Oui mais sans plus.

Assesseur: en rehaussant votre maison de deux rangées de parpaings avant la tempête Xynthia, soit d’environ 50-60 cm, on peut considérer que s’il n’y avait pas eu ce rehaussement l’eau serait montée à 2 mètres ?

oui exactement.

Assesseur: Que ce serait-il passé?

Je ne sais pas, je pense qu’on aurait pu s’en sortir avec ma femme, mais nous recevions des amis cette nuit-là, qui eux n’auraient peut-être pas pu s’en sortir. Comme l’a indiquée ma femme, son amie ne mesurait que 1m60.
Audition de Monsieur Fabrice DEREPAS partie civile.

Monsieur DEREPAS commence son récit de la catastrophe qu’il a vécu avec une très grande émotion.

On est arrivé dans la région le 1er juin 2009 car mon épouse avait trouvé un emploi. On a eu un rendez-vous avec Monsieur BABIN pour louer une maison. Peu de temps après on a eu une réponse favorable.

Cette nuit-là, des bruits provenant des toilettes m’ont réveillé. J’ai levé ma femme et ses enfants afin qu’on se mette à l’abri. L’eau est montée très rapidement, j’ai donc décidé de faire sortir ma famille par le toit. J’ai laissé Nathalie ma femme sous les combles avec les enfants et je suis monté sur le toit en retirant les tuiles.

Lorsque je me suis retrouvé au dessus du toit, j’ai vu qu’il y avait un courant énorme. J’ai allumé ma torche et j’ai aperçu Patrice et Muriel ROUSSEAU, nos voisins, accrochés au coffre de leur voiture qui luttaient contre ce courant. J’ai essayé de les appeler, mais comme il y avait beaucoup de vent ils n’ont rien entendu. Je leur criais de monter sur le toit. Ils étaient accrochés au coffre de leur véhicule, puis à la gouttière, avant de lâcher prise et de disparaître. Ils ont lutté contre le courant jusqu’à n’avoir plus de force. Je les surveillais, je criais et je les ai vus partir. Je voulais plonger pour les aider mais ma femme souhaitait que je reste près d’elle. Il y avait des cris, c’était terrible. J’ai réalisé que autour de moi il n’y avait eu aucun signe de vie, nous étions seuls. J’ai pris conscience que c’était grave que les gens avaient disparu.

Le Président: vous étiez à combien de mètre des ROUSSEAU ?

Une trentaine, Les ROUSSEAU étaient mes voisins les plus proches.

Cette prise de conscience quand j’ai compris qu’il y avait beaucoup de morts à côté de moi a été difficile à gérer. C’était un cauchemar! Je connaissais le petit Camil BOUNACEUR, il jouait avec Antoine le fils de ma femme.

Après la disparition des ROUSSEAU, je suis retourné dans la maison sous les combles avec ma famille. J’avais froid. Les hélicoptères sont venus nous chercher vers 10H, puis on a été transporté par un zodiac. On est descendu du bateau et un couple que l’on ne connait pas nous a proposés de l’aide. La gendarmerie nous a pris en charge et nous a ramenés à l’Aiguillon. Là-bas J’ai été marqué car on a eu la visite de Messieurs DE VILLIERS et MARRATIER et j’ai cette vision de ce dernier qui était derrière M. DE VILLIERS, le regard froid, les mains dans les poches, il ne disait rien. J’ai mis ma main sur l’épaule de M.MARRATIER en lui demandant très gentiment ce qui allait se passer par la suite pour nos maisons. Il a repoussé ma main et n’a rien répondu. Pendant 4 ans j’ai réfléchi à ce geste et je comprends toujours pas.

Je m’interroge, pourquoi j’étais là avec ma famille à 50 mètres de la digue. Pourquoi on m’a loué cette maison? C’est impossible de louer des logements si dangereux!

Je m’étonne que des gens responsables à un tel niveau avec une telle connaissance du territoire de la Faute puissent affirmer méconnaître la dangerosité de cette digue! Il faut être culotté!!!

Monsieur BABIN, Monsieur MARRATIER on attend des réponses, les gens ont besoin de savoir!

Je m’interroge aussi, Monsieur MARRATIER, Monsieur BABIN lorsque vous étiez au restaurant ce soir, vous avez pensé à nous?

Le Président: Monsieur BABIN vous a-t-il informé que votre maison était sur un territoire soumis à un PPRI?

Non à aucun moment. On a pas eu le moindre écho sur le risque que l’on courrait. D’ailleurs lorsque j’ai vu l’inondation je n’ai pas compris d’où venait l’eau, je pensais à la mer mais surement par à l’Estuaire du Lay.

Me SAINTAMAN: vous avez été réservé sur le récit des faits, mais il faut rappeler que votre maison a été inondée de 2m30 d’eau et que vous avez porté les deux enfants de votre compagne pour les mettre en sécurité sur le toit et que vous avez veillé toute la nuit.

Me ROCHERON OURY: Je voudrais rappeler que l’on est en présence de victimes qui nous expliquent leur ressenti mais pour la défense le ressenti est différent. Il faut revenir sur le factuel pour essayer de modifier le ressenti. Il est important dans le cadre de l’audience de trouver cette vérité. Monsieur DEREPAS quand vous avez signé votre bail, vous avez signé ce document qui précisait qu’il y avait des risques? Vous aviez vu cette digue?

Oui j’avais vu la digue, j’ai signé le document mais je ne l’ai pas bien lu, je venais de Toulouse j’avais d’autres préoccupations et une personne de l’agence nous a parlé des risques mais en le minimisant. Elle a dit clairement qu’il y avait des risques très faibles d’inondation pas plus de 50 cm, j’ai eu 2m30 d’eau chez moi!!

Me RAPIN: une observation, sauf erreur il ne peut pas réduire la parole d’une victime à un ressenti car depuis hier je n’entends pas que des ressentis j’entends des faits.

Audition de Madame Nathalie LARROQUANT (épouse de M.DEREPAS) partie civile.

Nous avons emménagé effectivement le 1er juin 2009. Ce soir-là, je me suis endormie très rapidement. Vers 2H30 mon mari me réveille, il me dit qu’il entend des « glouglous » dans les toilettes. On s’est levé et mon mari a vu l’eau. J’ai réveillé les enfants. Ils se sont habillés. Ca faisait seulement un an que j’étais à la Faute sur Mer donc je n’avais aucune culture du risque. J’ai commencé à nettoyer le sol et mon mari, lui, a compris que l’eau montait à une vitesse impressionnante. Il nous a emmenés sous les combles. Mon mari a retiré une tuile du toit et est monté sur le toit. Nous sommes restés sous les combles confinés. Vers 4h30, la marée s’est arrêtée, l’eau commençait à descendre. J’entendais des cris. Mon mari a commencé à crier j’ai compris qu’il parlait au couple ROUSSEAU. On est tous monté sur le toit mais on a vu personne, j’ai cru que tout le monde était mort.

Après la catastrophe on ne savait plus quoi faire on ne savait plus si nous devions rentrer sur Toulouse ou rester ici. Finalement on a eu beaucoup d’aides des gens grâce au bouche à oreille. On a eu beaucoup de soutiens de mes collègues de travail. On a eu des gens formidables autour de nous.

Le Président: Vous avez indiqué que l’eau est montée très rapidement:

Oui, très rapidement, l’eau a presque attend le plafond. Si mon mari ne nous avait pas réveillés, je serais morte.

Me DENIS: Vous trouvé normal pour un adjoint au maire d’autoriser la construction d’une maison dans laquelle l’eau peut monter en dix minutes à 2m30 de hauteur?

Non

Me DENIS: vous trouviez normal que l’on retrouve les BABIN à tous les stades de la procédure, autorisation du permis de construire, construction de la maison, location de la maison…?

Non ce n’est pas normal.

Le ministère public: Quand on vous a remis à l’agence cette carte de zonage, on vous a dit que l’on vous la remettait par obligation et par formalisme?

Oui, si on me l’avait dit avant j’aurais refusé d’emménager.

Suspension d’audience 

Maître SEBAN : J’ai une remarque à faire sur le compte-rendu du 18 septembre : M.ROSSIGNOL a répondu à ma question et ce n’est pas reproduit sur la note d’audience. Idem pour la déclaration de M. HAMM qui a dit qu’aucune surcote n’avait jamais atteint celle de Xynthia.

 

Déposition d’Ahmed BOUNACEUR, partie civile :

La partie civile : Monsieur le Président, depuis deux semaines, je fais des cauchemars, c’est très dur de m’exprimer devant vous, je vais essayer de le faire. Entendre les prénoms de mes enfants, de ma mère, de ma femme, c’est une deuxième souffrance pour moi. Et voir ici, avec leur inconscience, les gens qui nous ont exposés à un danger et ont causé leur mort, c’est très dur. C’est très dur d’être ici. J’entends les cris et les pleurs de mes enfants. Ça me hante. Je priais de mourir avant mes enfants pour ne pas les voir mourir. Je les ai vu mourir. J’avais froid, j’avais peur, je stressais, mon fils m’a demandé de pousser la fenêtre. Je n’avais plus de force, mais j’ai réussi, je suis monté sur le toit. Ce soir là, j’ai dit aux enfants de rester calmes, on était tous coincés dans la chambre. Je suis monté sur le toit, j’ai ouvert le toit, j’ai vu ma fille en hypothermie, j’ai vu leurs corps. J’ai tenté de la réchauffer, et je suis médecin. J’essayais d’entendre les battements de son cœur, j’avais peur de la perdre. Chaque jours j’entends les cris de mes enfants, cette angoisse m’empêche d’avancer. Venir ici, est une épreuve pénible.

Le Président : Nous saluons votre courage M. BOUNACEUR. Pourriez-vous nous parler de votre installation ? Vous avez fait construire cette résidence secondaire en 2009 ?

La partie civile : Oui, je recherchais un terrain pour construire une maison, pour loger ma mère et avoir une maison de vacances pour les enfants. Je ne connaissais pas la Faute sur mer. J’ai rencontré Philippe Babin qui m’a montré le lotissement les Voiliers. Alors j’ai acheté ce terrain. On ne m’a jamais parlé des risques. J’ai été surpris de voir la digue, et à ses pieds une bande de 50m sans construction. Philippe Babin m’a expliqué que cette bande protégeait les habitations, et que nous serions plein à habiter dans cette zone, qu’il n’y avait aucun risque.

Philippe Babin m’a orienté vers Patrick Maslin, qui était selon lui le meilleur rapport qualité prix de la région. J’ai fait des plans pour faire construire une maison à étage mais Patrick Maslin a refusé de construire cet étage pour des raisons de sécurité de l’ouvrage. Je voulais voir d’autres constructeurs pour avoir cette maison à étage. Mais Philippe Babin m’a dit qu’il fallait déposer le permis très vite. Je ne savais pas pourquoi, mais je faisais confiance au professionnel qu’il était. J’ai pris contact avec Patrick Maslin qui a répété que je ne pouvais pas construire d’étage alors que la maison en face de chez moi, était à étage. Je lui faisais confiance, il a abusé de moi. Et j’ai découvert plus tard que Patrick Maslin avait construit ma maison 20 cm en dessous du seuil de référence. Ces 20cm auraient surement sauvé mes enfants. Je n’ai pas regardé les papiers qui parlaient du risque d’inondation, car je faisais confiance aux professionnels qui m’entouraient, le constructeur et l’agent immobilier. Je voulais un étage pour ma maman, et le rez-de-chaussée pour les enfants. Ils n’ont jamais évoqué le risque d’inondation. Philippe Babin voulait juste vendre son terrain. On a obtenu le permis de construire dans un temps record. Patrick Maslin s’est occupé de toutes les formalités d’autant qu’il disait être dans le Conseil municipal. Et les travaux ont commencé. Je ne connaissais personne à la Faute sur mer sauf le voisin. Nous n’y sommes allés que très peu.

Le Président : Avez vous parlé de la digue avec vos voisins ?

La partie civile : Non, nous ne savions rien, peut-être aurais-je pu avoir peur de la mer, mais jamais du Lay. Le soir de la tempête, on a regardé la télévision, on a vu cette alerte quant au vent. Jamais pour la submersion marine ou pour l’inondation. Mon fils fait ses études à Paris. Depuis, il s’enferme, il ne parle pas beaucoup. Il est suivi pas des psychologues. Ma fille ne va pas bien, j’étais en deuil, je ne me suis pas occupé de ma fille, alors qu’elle en avait besoin. Elle a été suivie. Mais cela n’a pas suffit à ce qu’elle fasse son deuil. Moi, je suis dépressif, et sous médicaments. Je remonte la pente très difficilement. A cause du procès, je suis hanté par les souvenirs, et je ressens de la culpabilité d’avoir fait confiance à ces gens, j’en veux au Maire de ne pas nous avoir sauvés, alors que les maires des alentours ont aidé les habitants. Et je n’ai jamais eu un message de compassion par René Marratier. Avant cela, et depuis, je n’ai jamais eu de contact avec les membres de la Mairie.

L’Assesseur : Qui a fait la demande de dépôt de permis de construire le 7 décembre 2007 ?

La partie civile : Patrick Maslin, il m’a dit qu’il ne fallait pas m’inquiéter car il était dans le conseil. Il a été délivré le 21 décembre par Mme Babin. Je voulais faire une maison à étage, et le surcout n’était pas un problème.

Maître DENIS : Patrick Maslin vous a t-il dit que sa maman qui vous délivrerait le permis de construire ? Et rétrospectivement êtes-vous surpris de la rapidité de la délivrance ?

La partie civile : Oui, car pour ma maison principale, il a fallu attendre un mois. On m’a mis un peu la pression pour que les travaux commencent très vite. Je n’étais pas pressé, je voulais demander à d’autres constructeurs s’ils accepteraient de me faire un étage. C’est Philippe Babin qui m’a convaincu de suivre Patrick Maslin. Je n’ai aucun appui moi, à la municipalité, je ne connais personne dans cette région, et personne de la DDE des Sables d’Olonne contrairement à ce qu’a dit Patrick Maslin lors de son audition.

Maître SAINTAMAN : Pourquoi vouliez-vous une maison à étage ?

La partie civile : Parce que on était sept, je voulais loger toute la famille pas du tout pour des raisons de sécurité. Le permis de construire comportait en article 2 une réserve, mais Françoise Babin a levé cette incertitude en avril.

Maître SAINTAMAN : Vous êtes urgentiste, alors vous avez l’habitude de ce genre de situation ?

La partie civile : En cas de problème, il faut mettre en place un poste de sécurité pour diriger les victimes. On ne laisse pas les gens sans secours. Ce n’est pas le serment que j’ai prêté.

Maître SAINTAMAN : Comment avez-vous trouvé la gestion de la catastrophe et le rôle du Maire lors de la catastrophe ?

La partie civile : Ils n’ont pas rempli leurs devoirs, alors que René Marratier savait que la catastrophe allait se produire, c’est de l’inconscience.

Maître DENIS : Avec les autres médecins, vous avez l’habitude de travailler en équipe, quelle peut-être la conséquence si les informations importantes ne sont pas transmises ?

La partie civile : Ça peut causer la mort.

Maître DENIS : Lors de votre transport au poste de sécurité de l’Aiguillon avez-vous vu les membres de la municipalité ?

La partie civile : Non, que des bénévoles.

Maître DENIS : Lors des obsèques avez-vous eu un geste ou un appel de la Mairie ?

La partie civile : Non aucun geste, sauf Philippe Babin qui m’a présenté ses condoléances.

Maître SAINTAMAN : Vous avez reçu une aide financière ? Une partie des dons donnés par toute la France ?

La partie civile : Non, rien.

Le Procureur : Vous dites que René Marratier n’a pas rempli son devoir de Maire, que les autres Maires ont agi, comment le savez-vous ?

La partie civile : Par les journaux et la télévision.

Maître ROCHERON–OURY : Je voudrais indiquer qu’il y a une convention signée avec la DDE sur la conformité des permis de construire. Nous nous demandons aussi comment il a obtenu ce permis aussi rapidement.

Le Président : Merci pour votre courage Monsieur, et votre dignité.

 

Déposition de Rémi PLAIRE, partie civile :

La partie civile : Lors du drame j’habitais dans le lotissement des Voiliers, je suis le plus proche voisin du Docteur Bounaceur. Je voudrais vous parler de ma compagne qui était hospitalisée avant la catastrophe, elle avait fait 2 attaques. Elle était très faible à ce moment. Ses enfants devaient venir à la maison passer la soirée avec nous, nous avions décommandé, on devait déjeuner ensemble le dimanche midi. Ma femme était animatrice dans une maison de retraite. C’était sa vocation, elle s’impliquait beaucoup. Ça faisait 2 mois qu’elle vivait entre son lit et son travail. On a diné de bonne heure pour aller voir un salon à La Rochelle, on est passés par chez moi pour ouvrir les volets et monter le chauffage. On savait que l’on était en alerte orange, mais pas en rouge. Au salon loisirs, on a regardé des stands et elle a réalisé une statue sur un stand. Nous avons quitté le salon vers 19h, on est allé au restaurant, ça faisait très longtemps que l’on n’y était pas allé. Elle a mangé avec appétit, ça faisait longtemps qu’elle ne faisait plus que grignoter. On est rentré à la Faute sur mer. On est repassé par chez moi et on est rentré vers 22h ou 22H 30, je ne me souviens plus des heures, j’ai oublié. On était au lotissement Les Voiliers. On s’est couché vers 23h. Plus tard, Marguerite s’est réveillée, elle avait soif, nous nous sommes levés, j’ai enfilé mes nouvelles charentaises. Dans le séjour, je lui ai fait une tisane. J’ai vu un filet d’eau derrière la baie vitrée électrique. On a vu l’eau s’infiltrer. J’avais un seau et une serpillère. Malheureusement je ne connaissais pas Monsieur et Madame Anil, les lanceurs d’alerte. Je n’ai pas su faire le geste qui sauve, j’ai même fait le geste qui tue. L’électricité s’est coupée et les vitres et volets se sont bloqués. On était piégé. Je ne trouvais pas les clés, la porte était fermée. Je lui ai dit d’aller se couvrir, elle a enfilé un vêtement chaud. Je n’avais pas la notion du risque, j’ai perdu 10 min à essayer d’ouvrir la trappe des combles avec un ballet. J’ai perdu des minutes cruciales. J’ai ouvert la porte du garage et la porte m’a explosé au visage : une vague d’ 1m50. J’ai traversé 12m sous l’eau, tout le couloir. Je me suis retrouvé dans le séjour et je lutais contre le courant. Je voulais retourner dans le garage mais je n’y arrivais pas et le volet du garage était cassé. Il y avait du courant. Marguerite est montée sur le lit. Sans ce lit, je serais mort. Il était en fonte. Il est très lourd, il n’a jamais flotté. Marguerite était sur le lit, elle perdait la maitrise, elle appelait son fils Alain au secours, elle m’a demandé de réciter des chapelets depuis le matelas, et même si entre l’église catholique et moi, il y a un monde, j’ai accepté. Et l’eau montait pendant qu’elle disait des je vous salue marie. J’ai attrapé Marguerite et je l’ai entrainée avant que son matelas ne se renverse. Nous sommes montés sur le lit en fonte et contre le mur. Et je tenais Marguerite, il y avait un placard et en hauteur, une étagère. On l’avait fabriqué. C’était du beau travail. Je m’appuyais contre celle-ci. Et je tenais Marguerite sur ma cuisse. L’eau est montée encore. Marguerite m’a glissé des mains et elle est partie. J’étais dans l’eau depuis une heure et demie. Mais je n’avais pas froid. Lorsque Marguerite a glissé, je me suis laissé glisser aussi et je n’arrivais pas à la remonter. Je manquais d’air. J’ai fait de la plongée pourtant. Ça n’a pas suffit. Je suis remonté, j’ai tout donné pour remonter sur le lit. Je n’entendais pas M. Bounaceur crier. Tout valsait, sous la pression de l’eau, la cloison s’est détachée d’un seul bloc. Tous les meubles. J’étais toujours perché sur mon lit, sur la pointe des pieds pour avoir de l’air, je devais incliner la tète pour avoir de l’air, l’eau entrait dans ma bouche, j’entends encore mon souffle dans la pièce et j’ai perdu connaissance. Je devrais être mort. J’ai repris connaissance, je ne sais pas combien de temps après mais la hauteur de l’eau était descendue. J’étais à l’opposé du placard allongé dans l’eau. J’ai réussi à vider le placard et je me suis glissé là, je pense qu’il commençait à faire jour. J’étais sur le dos sur cette étagère. J’avais de l’eau à mi cote encore et je me suis couvert avec une combinaison de ski. J’ai reperdu connaissance. Mais le passage des hélicoptères m’a réveillé. J’ai reconnu ce bruit car j’étais dans l’armée de l’air. Je n’ai pas eu le courage de sauter dans l’eau. 2 fois je l’ai entendu. Il est revenu une troisième fois, mais la le froid m’avait envahi. Je n’avais jamais eu froid mais là, j’avais froid, je claquais des dents. J’avais peur de les casser. Remi, il faut que tu sortes. J’ai nagé vers le bureau, en apnée et en surface, j’ai tourné, c’était calme. Il n’y avait plus de porte. Je me suis heurté à tous nos meubles et jusqu’à la fenêtre. Je n’ai pas pensé à Marguerite qui était là. Je suis arrivé à la fenêtre, je l’ai ouverte, et me suis glissé et j’ai cassé les volets en plastique avec mon dos. J’étais à l’extérieur, je me suis pendu à une gouttière. L’hélicoptère était là. Je me suis montré. Il m’a vu. J’ai été hélitroyé. J’ai dit au pilote que ma femme était dans la maison. Il l’a fait signe immédiatement, c’est ça l’armée. Je me suis effondré sur la digue, je ne pouvais plus bouger, des pompiers m’ont aidé et un photographe de Ouest France m’a photographié, nu soutenu par les pompiers qui m’ont sauvé. Le pompier a mis le chauffage et on m’a donné une couverture. J’ai été envoyé à la cantine de l’Aiguillon, j’étais près de chez moi. Je suis resté là longtemps. Je ne pouvais pas parler. Je me considère comme un enfant du pays. Mais je ne suis plus le même homme. Avant j’étais un homme costaud. J’ai pris 11kg. Moi depuis la tempête, je ne mange pas plus, mais j’ai pris 11 kg. Je ne peux plus regarder des films de suspense. Je fais des cauchemars, je voudrais pleurer sans cesse. Alors que dans ma carrière, je suis allé sur le terrain lors de crash. Je voudrais faire un parallèle entre la commune et un escadron de chasse, il faut un responsable et des adjoints. Tout le monde prend ses responsabilités. On ne part pas si tout n’est pas parfait, vérifié.

 

Prise de note interrompue avant la fin de l’audience.

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